Cheikh
Anta Diop
est né le 29 décembre 1923 dans le village de
Caytou situé dans la région de
Diourbel (en pays Baol-Cayor), près de la ville de
Bambey à environ 150 km de
Dakar, au Sénégal.
Son père, (le Jeune)
Massamba Sassoum Diop est décédé
peu de temps après sa naissance. Sa mère,
Magatte Diop, vécut jusqu'en 1984.
Cheikh Anta Diop épousera en 1953, à
Paris, une Française, Louise Marie Maes,
diplômée d'Études supérieures en Histoire et Géographie. Quatre fils
naîtront de cette union.
Cheikh Anta Diop décède le 7 février
1986 ; il repose, selon sa volonté, à Caytou, auprès de son
grand-père (le Grand) Massamba Sassoum Diop, fondateur du village.
1927
- 1937 : A l'âge de
quatre-cinq ans il est envoyé à l'école coranique. Il est ensuite
scolarisé à l'école française : l'École
Régionale de Diourbel. En 1937, il obtient son certificat
d'études primaires.
1938 - 1945
: Études secondaires à Dakar et
Saint-Louis. Il obtient, en
1945, ses baccalauréats ("brevet de capacité colonial correspondant
au baccalauréat") en mathématiques et en philosophie.
Durant ces années passées au lycée, il
élabore un alphabet conçu pour transcrire toute langue africaine et
il entreprend également la rédaction d'une histoire du Sénégal. Dans
cette même période apparaissent ses premières réflexions qui plus
tard déboucheront sur son projet de renaissance culturelle et
d'indépendance politique de l'Afrique noire. Il se destine néanmoins
à un métier scientifique appréhendé comme un devoir de découverte et
d'invention vis-à-vis de l'humanité.
1946
: Arrivée à Paris au cours de
l'année 1946. Il s'inscrit en classe de Mathématiques Supérieures,
son but étant de devenir ingénieur en aéronautique. En attente de la
rentrée de l'année 1946-1947, il s'inscrit en
Faculté des Lettres de la Sorbonne en philosophie. Il
suit, en particulier, l'enseignement de
Gaston Bachelard.
A son initiative est créée l'Association
des Étudiants Africains de Paris dont le premier
président est Cheikh Fall.
Amadou Mahtar M'Bow en deviendra
quelques années plus tard le président.
1947
: Cheikh Anta Diop poursuit, parallèlement à ses études, ses
recherches linguistiques sur le wolof et le sérère, langues parlées
au Sénégal. Il entre en relation avec Henri
Lhote (le découvreur des fresques du Tassili, au Sahara).
1948
: Il achève sa licence de philosophie et s'inscrit en Faculté des
Sciences. Il publie sa première étude de linguistique,
Étude linguistique ouolove – Origine de la
langue et de la race valaf, dans la revue "Présence
Africaine" créée par le grand homme de culture
Alioune Diop en 1947, qui
fondera la maison d'édition Présence
Africaine puis la Société Africaine de Culture
(SAC). La même année, Cheikh Anta Diop publie, dans un numéro
spécial de la revue "Le Musée Vivant",
un article intitulé Quand pourra-t-on
parler d'une renaissance africaine ? en partie consacré à
la question de l'utilisation et du développement des langues
africaines, et dans lequel Cheikh Anta Diop propose pour la première
fois de bâtir les humanités africaines à partir de l'Égypte
ancienne.
1949
: Il fait inscrire sur les registres de la Sorbonne le sujet de
thèse de doctorat ès-Lettres qu'il se propose de traiter, sous la
direction du professeur Gaston Bachelard, et qui s'intitule "L'avenir
culturel de la pensée africaine".
1950
: Il obtient les deux certificats de chimie : chimie générale et
chimie appliquée.
Il prend la décision d'intégrer en
juillet 1950 le RDA (Rassemblement
Démocratique Africain) alors dirigé par
Félix Houphouët-Boigny, tout en rappelant fermement à la
direction du RDA son devoir de ne pas faillir à sa mission
historique : celle d'une véritable libération du continent africain.
Retour au Sénégal pendant l'hivernage (juillet-août)
de l'année 1950. Il donne, à Dakar et Saint-Louis, plusieurs
conférences dont la presse se fait l'écho :
— "Un
enseignement est-il possible en Afrique dans la langue maternelle
?",
— "Nécessité et
possibilité d'un enseignement dans la langue maternelle en Afrique",
— "Les
fondements culturels d'une civilisation africaine moderne".
Au cours de ce même séjour, il propose,
avec des notables, dans une lettre adressée aux autorités de l'AOF
(Afrique Occidentale Française), un plan de reboisement du pays afin
de faire face au danger de la sécheresse.
1951
: Inscription sur les registres de la faculté de son sujet de thèse
secondaire "Qu'étaient les Égyptiens
prédynastiques", sous la direction du professeur
Marcel Griaule.
Il devient le secrétaire général de
l'Association des Étudiants du RDA
(AERDA), à Paris.
Il donne plusieurs conférences :
— "L'origine du
wolof et du peuple qui parle cette langue",
organisée à Paris au Musée de l'Homme par la Société des
Africanistes, dont le secrétaire général est à l'époque Marcel
Griaule.
— "Les fondements
culturels d'une civilisation africaine moderne",
organisée par l'Association des Étudiants africains de Paris,
— "Objectifs d'une
politique africaine efficiente",
également organisée par l'Association des Étudiants africains de
Paris.
Il organise, dans le cadre de l'AERDA,
le premier congrès panafricain politique d'étudiants d'après-guerre,
du 4 au 8 juillet 1951. La WASU
(West African Student Union)
participe à ce congrès.
1952
: C'est dans le bulletin mensuel de l'AERDA, "La
Voix de l'Afrique noire" de février 1952, dans un article
intitulé "Vers une idéologie politique
africaine", que Cheikh Anta Diop pose pour la première
fois en Afrique francophone, sous leurs multiples aspects,
culturels, économiques, sociaux, etc., les principes de
l'indépendance nationale et de la constitution d'une fédération
d'États démocratiques africains, à l'échelle continentale.
1953
: Dans le bulletin mensuel de l'AERDA, "La Voix de l'Afrique noire"
de mai-juin 1953, il publie l'article "La
lutte en Afrique noire". Il quitte le secrétariat général
de l'AERDA.
1954
: Nations nègres et Culture — De
l'antiquité nègre égyptienne aux problèmes culturels de l'Afrique
noire d'aujourd'hui paraît aux Éditions Présence
Africaine. Ce livre est en fait le texte des thèses principale et
secondaire destinées à être soutenues en Sorbonne en vue de
l'obtention du doctorat d'État ès Lettres ; mais aucun jury ne put
être formé. A propos de cette œuvre maîtresse de Cheikh Anta Diop,
Aimé Césaire écrit : "…
Nations nègres et Culture — [livre] le plus
audacieux qu'un Nègre ait jusqu'ici écrit et qui comptera à n'en pas
douter dans le réveil de l'Afrique" (Discours
sur le Colonialisme, Paris, Présence Africaine,
1955).
1956
: Il se réinscrit en thèse d'État avec comme nouveau sujet principal
"Les domaines du matriarcat et du
patriarcat dans l'antiquité".
A partir de 1956 il enseigne la physique
et la chimie aux lycées Voltaire et Claude Bernard, à Paris en tant
que maître-auxiliaire.
Parution dans la revue "Présence
Africaine" de l'article Alerte sous les
Tropiques, texte qui préfigure son futur livre-programme
: Les fondements culturels, techniques
et industriels d'un futur État fédéral d'Afrique noire
(1960).
Cheikh Anta Diop donne une conférence
sur le thème : "Les origines nègres de la
civilisation égyptienne", organisée par Présence
Africaine, Salle des Sociétés Savantes, à Paris.
Il participe au premier Congrès des
Écrivains et Artistes noirs qui se déroule à la Sorbonne, à Paris. Il y
apporte la contribution intitulée : Apports
et perspectives culturels de l'Afrique qui paraît dans un
numéro spécial de la revue "Présence Africaine".
Débat contradictoire avec l'égyptologue
français Jean Sainte-Fare Garnot.
1957
: Inscription sur les registres de la faculté de son sujet de thèse
complémentaire : "Étude comparée des
systèmes politiques et sociaux de l'Europe et de l'Afrique, de
l'Antiquité à la formation des États modernes".
Il entreprend une spécialisation en
physique nucléaire au Laboratoire de chimie nucléaire du Collège de
France dirigé par Frédéric Joliot-Curie
puis à l'Institut Pierre et Marie Curie, à Paris. Cheikh Anta Diop
nourrissait une admiration toute particulière à l'égard du grand
physicien français Frédéric Joliot-Curie avec lequel il est entré en
contact pour la première fois en 1953.
1959
: à Rome, il participe au second Congrès des Écrivains et Artistes
noirs. Il y fait une communication portant sur
L'Unité culturelle africaine qui
paraît dans un numéro spécial de la revue "Présence Africaine".
"Y a-t-il une
unité culturelle de l'Afrique noire
?", est une conférence
qu'il donne en clôture des Journées Africaines de Rennes : séminaire
organisé par l'Association des Étudiants Africains et l'A.G.E.R.
(Association Générale des Étudiants de Rennes) sur le thème : "Les
langues vernaculaires en Afrique noire et structures sociales de
l'Afrique noire en liaison avec le problème des pays sous-développés",
Rennes (France), 1er et 2 juillet 1959.
1960
: Le 9 janvier 1960, il soutient, à la Sorbonne, sa thèse de
doctorat d'État en lettres. Elle est publiée aux Éditions Présence
Africaine sous les titres : L'Afrique
noire précoloniale et
L'Unité culturelle de l'Afrique noire. Le
préhistorien André Leroi-Gourhan
était son directeur de thèse, et son jury était présidé par le
professeur André Aymard, alors
doyen de la faculté des Lettres. La mention honorable lui a été
attribuée. Un reportage sur la soutenance de cette thèse, qui a duré
plusieurs heures, a été réalisé par le journaliste
Doudou Cissé et diffusé sur les
ondes de la Radiodiffusion d'Outre-Mer. On peut aussi se référer à
l'article de Bara Diouf paru dans "La Vie Africaine", n° 6, Paris,
mars-avril 1960. Sa thèse de doctorat porte la dédicace suivante :
"A mon Professeur Gaston Bachelard dont l'enseignement
rationaliste a nourri mon esprit".
La même année, sort la première édition
du livre Les fondements culturels,
techniques et industriels d'un futur État fédéral d'Afrique noire.
Retour définitif au Sénégal en 1960 : "Je
rentre sous peu en Afrique où une lourde tâche nous attend tous.
Dans les limites de mes possibilités et de mes moyens, j'espère
contribuer efficacement à l'impulsion de la recherche scientifique
dans le domaine des sciences humaines et celui des sciences exactes.
Quand à l'Afrique noire, elle doit se nourrir des fruits de mes
recherches à l'échelle continentale. Il ne s'agit pas de se créer,
de toutes pièces, une histoire plus belle que celle des autres, de
manière à doper moralement le peuple pendant la période de lutte
pour l'indépendance, mais de partir de cette idée évidente que
chaque peuple a une histoire." (Cheikh Anta Diop, interview
in "La Vie Africaine", n°6, mars-avril 1960, p. 11).
Le 1er octobre 1960, il est nommé
assistant à l'Université de Dakar pour travailler à l'Institut
Français d'Afrique Noire (IFAN). Il ne lui est confié aucun
enseignement en sciences humaines.
Il donne plusieurs conférences, relayées
par la presse :
— "Comment
recréer, à partir d'une langue l'unité linguistique à l'échelle du
continent ?",
— "Comment
recréer, à partir d'une langue l'unité linguistique en Afrique noire
?", conférence organisée par le Centre Régional
d'Information de Diourbel (Sénégal),
— "Origine et
évolution du monde noir de la préhistoire à nos jours",
organisée sous l'égide de l'Union Culturelle des Enseignants de
Dakar, à l'École Clémenceau.
1961
: Cheikh Anta Diop entreprend de créer un
laboratoire de datation par le Carbone 14 (radiocarbone) au sein de
l'IFAN de Dakar alors dirigé par le professeur
Théodore Monod. De nombreux
domaines peuvent bénéficier de l'existence d'un tel laboratoire :
l'archéologie, la préhistoire, l'histoire, la géologie, la
climatologie … Des relations de travail seront établies entre l'IFAN
et le CEA français (Commissariat à l'Énergie Atomique)/CNRS (Centre
National de la Recherche Scientifique français) au travers, entre
autres, de Jean Le Run, qui
avait monté le premier ensemble de datation par le radiocarbone du
CNRS à Gif-sur-Yvette, de Jacques Labeyrie,
Directeur du CFR (Centre des Faibles Radioactivités) et
Georgette Delibrias (Directrice
du Laboratoire du Radiocarbone du CFR).
Activité politique : Cheikh Anta Diop
crée, au Sénégal, un parti politique (le Bloc des Masses
Sénégalaises, BMS) d'opposition au régime en place dirigé par le
Président Léopold Sédar Senghor
et le Premier ministre Mamadou Dia.
Il en est le Secrétaire général.
1962
: Il dirige la construction des locaux du laboratoire de datation.
En raison de son activité politique il
est emprisonné de mi-juillet à mi-août 1962 à la prison de la ville
de Diourbel. Un non-lieu sera finalement prononcé.
Il réalise en septembre de cette année,
avec Jean Le Run, à Gif-sur-Yvette, la première datation de l'homme
d'Asselar.
Il achève
L'inventaire archéologique du Mali, étude qui
lui avait été confiée par Théodore Monod.
1963
: Achèvement de la construction du laboratoire et début de
l'équipement des différentes salles du laboratoire. Par une note de
service en date du 17 avril 1963, Théodore Monod officialise, au
sein du Département d'Archéologie et de Préhistoire de l'IFAN,
l'existence du "Laboratoire de Datation par le Radiocarbone" dont le
responsable est Cheikh Anta Diop.
Cheikh Anta Diop refuse les postes
ministériels qui sont proposés par Léopold Sédar Senghor au BMS. Une
telle acceptation aurait signifié un renoncement au programme du
BMS.
Dissolution du BMS, en octobre 1963, par
le gouvernement sénégalais. Cheikh Anta Diop crée aussitôt un autre
parti qui sera à son tour dissous l'année suivante.
1965
: Théodore Monod quitte définitivement l'IFAN.
1966
: L'ensemble transistorisé de comptage de la radioactivité, après
avoir été testé au Centre d'Études Nucléaires de Saclay (CEA/CNRS),
arrive en juillet au port de Dakar. Cet appareil, destiné à la
datation par le Carbone 14, bénéficie des plus récentes technologies
de l'époque. Dans le cadre des accords de collaboration technique,
il a été fourni et partiellement financé par le CEA. Le laboratoire
de datation commence à fonctionner.
Une commission du CEA, présidée par
Georgette Delibrias, directrice du Laboratoire de Radiocarbone de
Gif-sur-Yvette, se rend au Sénégal pour tester, avec succès, les
installations du laboratoire de Dakar.
Cheikh Anta Diop donne à la salle de
mesure des dates le nom de Théodore Monod et le nom de Jean Le Run à
celle du traitement chimique des échantillons, en témoignage de
reconnaissance à l'éminente personnalité scientifique qui a créé et
dirigé l'IFAN (jusqu'en 1965) et à l'un des pionniers du "Carbone
14" en France, devenu son ami.
A l'exception de celui de la Rhodésie du
Sud, c'est, alors, l'unique laboratoire de Carbone 14 existant en
Afrique noire. Les fondations du laboratoire ont été conçues pour
supporter un étage supplémentaire car Cheikh Anta Diop avait
envisagé dès le début du projet de développer et d'élargir les
activités de ce laboratoire qu'il considérait comme le noyau, au sud
du Sahara, d'un futur grand centre africain des faibles
radioactivités, devant regrouper à terme différentes méthodes de
datation.
Les résultats des datations des
échantillons archéologiques sont publiés dans le Bulletin de
l'IFAN et la revue internationale Radiocarbon.
Il reçoit avec feu le professeur
W.E.B. Du Bois, le prix du
1er Festival des Arts Nègres,
récompensant l'écrivain qui a exercé la plus grande influence sur la
pensée nègre du XXe siècle.
1967
: Parution de Antériorité des
civilisations nègres : mythe ou vérité historique ?
(Présence Africaine). Cheikh Anta Diop répond à l'ensemble des
critiques qui lui ont été faites depuis la parution de Nations
nègres et Culture, en particulier celles exprimées par les
africanistes Raymond Mauny,
Jean Suret-Canale, etc.
Cheikh Anta Diop publie dans le
Bulletin de l'IFAN une mise au point intitulée "A
propos de la chronologie", car il se trouve dans la
nécessité de réagir aux propos tenus par l'africaniste
Robert Cornevin dans un article
"La chronologie, pierre d'achoppement de l'histoire africaine",
publié dans "Magazine Afrique" (n°60, 1966). Il s'agit d'une réponse
circonstanciée aux réserves pseudo-scientifiques exprimées par
l'auteur à l'égard de la méthode de datation par le Carbone 14. Il
faut noter l'existence d'un climat de médisance et d'hostilité, créé
par un certain milieu africaniste, autour du laboratoire de datation
de Dakar.
Il est invité, en août à Copenhague, à
un colloque sur Humanisme africain - Culture scandinave, un
dialogue.
Il participe au Congrès Panafricain
de Préhistoire, qui se déroule à Dakar du 2 au 8 décembre 1967,
et présente aux congressistes l'installation et la mise en service
du Laboratoire du Radiocarbone de l'IFAN.
Du 11 au 20 décembre 1967, à Dakar, il
participe au 2ème Congrès international des africanistes,
dont il préside la Section VI : "Sciences naturelles et
technologie". Il contribue à la rédaction du "Rapport et
recommandations sur la recherche scientifique dans le domaine des
sciences de la nature et la technologie" et soumet une "Résolution
sur le péril atomique en Afrique".
1968
: Parution de l'ouvrage : Le laboratoire
du radiocarbone de l'IFAN (IFAN, Dakar) qui est un
descriptif de l'installation mise en place et rassemble les mesures
de stabilité des compteurs effectuées du 20 décembre 1966 au 30 mai
1967. Il contient également les résultats des premières dates
obtenues de trois échantillons fournis respectivement par le
professeur Théodore Monod, le laboratoire de Saclay/Gif-sur-Yvette
et une mission archéologique britannique en Gambie.
1970
: Cheikh Anta Diop est sollicité officiellement par
René Maheu, directeur général de
l'UNESCO, pour devenir membre du Comité scientifique international
pour la rédaction de l'Histoire générale de l'Afrique. Le
secrétaire général de ce comité est le Béninois
Maurice Glélé.
Il participe au colloque V. I.
Lénine et le développement de la science, de la culture et de
l'éducation, organisé sous l'égide de l'UNESCO du 6 au 10 avril
1970 à Tampere en Finlande.
1971
: Il est invité à Alger au colloque ayant pour thème : l'Unité
africaine.
Au VIIe Congrès Panafricain de
Préhistoire et des études du Quaternaire, qui se déroule à
Addis-Abeba en Éthiopie, il expose l'ensemble des méthodes mises en
œuvre au laboratoire de radiocarbone de Dakar.
1972
: Il donne une conférence publique en décembre 1972 au Campus
universitaire de Lubumbashi au Zaïre (province du Shaba) à l'issue
de laquelle il est porté en triomphe par les étudiants.
1973
: Le premier livre de Théophile Obenga,
L'Afrique dans l'Antiquité — Égypte
pharaonique/Afrique noire sort aux Éditions Présence
Africaine. Cheikh Anta Diop en a rédigé la préface.
1974
: Parution du livre Physique nucléaire
et chronologie absolue. Il s'agit d'un ouvrage de
synthèse, décrivant les diverses méthodes de datation d'échantillons
archéologiques et géologiques, en particulier celles du radiocarbone
mises en œuvre dans le laboratoire de Dakar.
C'est dans le cadre de la rédaction de
l'Histoire générale de l'Afrique,
qu'à son initiative, se tient au Caire, du 28 janvier au 3 février
1974, un colloque international sur Le
peuplement de l'Égypte ancienne et sur le déchiffrement de
l'écriture méroïtique, qui réunissait des
égyptologues du monde entier, parmi les plus éminents (cf. compte
rendu publié par l'UNESCO et dans le volume II de l'Histoire
générale de l'Afrique ainsi que dans la revue "Ankh",
n°3, juin 1994).
Les débats ont révélé la persistance de
désaccords importants sur l'origine anthropologique des anciens
Égyptiens :
"La conclusion des experts qui
n'admettaient pas la théorie d'un peuplement uniforme de la vallée
du Nil des origines jusqu'à l'invasion perse, énoncée par les
professeurs Cheikh Anta Diop et Obenga, a été que le peuplement de
base de l'Égypte s'était mis en place au Néolithique, en grande
partie en provenance du Sahara et qu'il avait uni des hommes venus
du nord et du sud du Sahara et différenciés par leur couleur. A
cette théorie, les professeurs Diop et Obenga ont opposé la leur,
qui soulignait l'unité du peuplement de la vallée par des Noirs et
les progrès de ce peuplement du sud au nord."
Par contre dans le domaine linguistique,
le professeur Jean Devisse,
rapporteur du colloque, écrit qu'"un large accord s'est établi
entre les participants". "Les éléments apportés par les
professeurs Diop et Obenga ont été considérés comme très
constructifs. (…) Plus largement, le professeur Sauneron a souligné
l'intérêt de la méthode proposée par le professeur Obenga après le
professeur Diop. L'Égypte étant placée au point de convergence
d'influences extérieures, il est normal que des emprunts aient été
faits à des langues étrangères ; mais il s'agit de quelques
centaines de racines sémitiques par rapport à plusieurs milliers de
mots. L'égyptien ne peut être isolé de son contexte africain et le
sémitique ne rend pas compte de sa naissance ; il est donc légitime
de lui trouver des parents ou des cousins en Afrique."
La conclusion générale indique que
"La très minutieuse préparation des communications des professeurs
Cheikh Anta Diop et Obenga n'a pas eu, malgré les précisions
contenues dans le document de travail préparatoire envoyé par
l'UNESCO (voir annexe 3), une contrepartie toujours égale. Il s'en
est suivi un véritable déséquilibre dans les discussions".
Ce colloque a marqué une étape capitale
dans l'historiographie africaine. Pour la première fois des experts
africains ont confronté, dans le domaine de l'égyptologie, les
résultats de leurs recherches avec ceux de leurs homologues des
autres pays, sous l'égide de l'UNESCO.
La légitimité scientifique de rechercher
systématiquement les liens, quels qu'ils soient, pouvant exister
entre l'Égypte ancienne et le reste de l'Afrique noire a été
reconnue au plan international comme en témoignent les
recommandations adoptées par l'ensemble des spécialistes présents au
Caire.
Le fait que l'Égypte ancienne soit
traitée dans le cadre de l'Histoire générale de l'Afrique,
ainsi que la rédaction par Cheikh Anta DIOP dans le Volume II du
chapitre I intitulé "L'origine des anciens
Égyptiens" (cf. l'Histoire générale de l'Afrique
op. cit. pp. 39-72), constituent deux exemples des retombées
directes du colloque du Caire.
A la 9e Biennale de la A.S.O.A.,
Abidjan (Côte d'Ivoire) qui a lieu du 27 mars au 1er avril 1974 et
dont le thème des débats est : "un nouveau modèle politique
scientifique en Afrique de l'Ouest", il envoie une communication
intitulée : "Perspectives de la recherche
scientifique en Afrique", qui sera présentée par le
professeur Souleymane Niang, actuel recteur de l'Université de
Dakar.
Du 25 au 30 mars 1974, il participe au
XXIVe Congrès de l'Institut International de Sociologie, à
Alger.
1975
: Aux USA, le 4 avril 1975, l'association "The
African Heritage Studies Association" lui décerne une
plaque commémorative pour sa contribution à la préservation et au
développement de la vie et du patrimoine des peuples d'origine
africaine dans le monde.
Cheikh Anta Diop prononce une conférence
sur "Les origines africaines de l'Humanité
et de la civilisation", dans le cadre des réunions
sur l'Histoire Générale de l'Afrique, qui se sont tenues à
Cotonou au Bénin en début septembre 1975 et qui réunissaient
plusieurs historiens parmi lesquels J.
Ki-Zerbo, J. Devisse, M. El Fasi, J.F. Ade Adjayi.
Le 22 novembre 1975, il se rend en
Guinée, sur invitation de Sékou Touré,
pour assister, à côté des délégations des pays progressistes, à la
commémoration de la victoire du peuple de Guinée sur les forces
portugaises qui avaient agressé ce pays.
Il participe au 2e Congrès Ordinaire
de l'Association des Historiens Africains, Yaoundé (Cameroun),
qui se déroule du 16 au 20 décembre 1975.
1976
: C'est l'année de parution de l'ouvrage
L'Antiquité africaine par l'image co-édité par les
Nouvelles Éditions Africaines et l'IFAN de Dakar.
Il participe au Symposium Afro-Arabe
sur la libération et le développement, qui se tient à Khartoum
(Soudan) du 7 au 11 janvier 1976.
Un Colloque international sur le thème
Afrique noire et Monde méditerranéen dans l'Antiquité, est
organisé par le professeur Raoul Lonis
de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Dakar, du 19 au 24
janvier 1976, qui rassemble hellénistes, égyptologues et
spécialistes de l'Antiquité. Cheikh Anta Diop y donne une conférence
dont le titre est "Évolution de l'humanité
de la Préhistoire à la fin de l'Antiquité".
Rapporteur de la Conférence régionale
sur la coopération technique entre les pays africains, il effectue
des missions dans différents pays africains pour le compte de la
Commission Économique des Nations Unies pour l'Afrique.
En septembre 1976, il participe au IXe
congrès de l'Union Internationale des
Sciences Préhistoriques et Protohistoriques (UISPP)
qui se tient à Nice, et à l'issue duquel il est élu membre du Bureau
de l'UISPP.
Il crée, le 3 février 1976, un nouveau
parti politique, le RND (Rassemblement
National Démocratique) dont l'organe de presse est
Siggi puis
Taxaw et dans lequel
Cheikh Anta Diop publiera plusieurs articles concernant la politique
intérieure sénégalaise, mais aussi la politique internationale, la
question de l'énergie à l'échelle du continent africain, celle des
déchets toxiques, etc. La loi dite "loi des trois courants" —
socialiste, libéral et marxiste-léniniste — est promulguée le 19
mars 1976 et appliquée de manière rétroactive dans le but de rendre
illégal le RND. Cette loi impose à l'opposition de se référer
explicitement aux trois courants précités qui devaient désormais
réglementer la vie politique au Sénégal. Le parti au pouvoir
s'attribue l'étiquette socialiste, le Parti Démocratique Sénégalais
(PDS) prend l'étiquette de parti libéral. Le RND de Cheikh Anta Diop
refuse de se plier à cette exigence et s'engage alors un bras de fer
politico-judiciaire entre le gouvernement de Senghor et le RND, qui
n'aura de cesse de lutter pour sa reconnaissance, pour la défense
des acquis démocratiques et le progrès de la démocratie au Sénégal.
1977
: Parution du livre
Parenté génétique de l'égyptien pharaonique
et des langues négro-africaines
où Cheikh Anta Diop systématise
en particulier la comparaison linguistique entre l'égyptien ancien
et le wolof, sa langue maternelle. Outre les comparaisons
grammaticales et phonétiques, cet ouvrage contient un lexique
comparatif dont Cheikh Anta Diop dit :
«
Nous avons établi ce lexique à l'aide
du Wörterbuch, et des textes qui l'accompagnent, du dictionnaire de
Faulkner et du lexique de Lambert comme cela a été dit page 94. Il
va de soi que les fausses étymologies sont nombreuses dans un
lexique de ce genre et qu'un long travail de plusieurs chercheurs,
seul, permettra de réduire progressivement leur nombre. Mais que
l'on soit sur la bonne voie, cela ne fait aucun doute. Ce qui manque
tragiquement, c'est le labeur des générations ! »
Cheikh Anta Diop, Parenté génétique de l'égyptien pharaonique et
des langues négro-africaines, Dakar, Abidjan, Université de
Dakar-IFAN/Nouvelles, Éditions Africaines, 1997, p. 161.
Il laisse
inachevé un travail, publié aux Éditions Présence Africaine sous le
titre Nouvelles recherches sur
l'égyptien ancien et les langues négro-africaines modernes.
A l'initiative du RND une pétition
demandant le retour à un multipartisme véritable au Sénégal est
signée par plusieurs centaines d'intellectuels sénégalais.
1978
: Le 13 mars 1978, le Sénégal perd Cheikh
Ahmadou M'Backé. Éminent chef spirituel appartenant à la
confrérie musulmane des Mourides,
c'était un homme de principes exceptionnel, d'une vaste culture,
d'une intelligence, d'une ouverture d'esprit et d'une générosité
hors du commun, reconnues de tous. Une amitié profonde unissait
Cheikh Ahmadou M'Backé et Cheikh Anta Diop.
1980
: Il prépare le premier congrès de l'Association
des Chercheurs du Monde noir dont il est le
président.
Le 25 février,
l'Université nationale du Zaïre lui décerne la Médaille
d'Or de la recherche scientifique africaine et le Grand Prix du
Mérite scientifique africain.
1981
: Il est nommé professeur d'histoire associé à la Faculté des
Lettres et Sciences Humaines de Dakar. Vingt-sept ans après la
parution de Nations nègres et Culture, vingt et un ans après
son doctorat d'État, l'Université de Dakar s'ouvre enfin à son
enseignement de l'histoire. Il y enseignera en maîtrise, en DEA et
dirigera des thèses jusqu'à sa disparition en 1986.
Parution du livre
Civilisation ou Barbarie — Anthropologie
sans complaisance (Présence Africaine). Ce
livre, dédié à la mémoire du grand homme de culture,
Alioune Diop, lui vaudra une
distinction : le Grand Prix Scientifique de l'Institut
Culturel Africain (ICA).
En 1980, l'UNESCO, alors dirigée par
Amadou Mahtar M'Bow, décide
d'écrire une nouvelle Histoire du développement scientifique et
culturel de l'humanité. En 1981, Cheikh Anta Diop figure avec
les égyptologues Théophile Obenga,
Aboubacry Moussa Lam,
Babacar Sall et les historiens
Joseph Ki-Zerbo et
Iba Der Thiam parmi les
spécialistes sollicités. Il fait partie de la commission
internationale mise en place pour ce projet dont le premier
secrétaire général est l'historien Alioune
Traoré. Il est en outre désigné co-directeur du Volume II
(Du troisième millénaire au VIIe siècle avant J.-C.).
Du 30 mars au 31 avril 1981, à Athènes,
il participe au colloque Racisme, science et pseudo-science,
réuni par l'UNESCO en vue de l'examen critique des différentes
théories pseudo-scientifiques invoquées pour justifier le racisme et
la discrimination raciale. Sa communication a pour titre "L'unité
d'origine de l'espèce humaine". L'écrivain
Tahar Ben Jelloun en rend compte
dans le quotidien français Le Monde. Le célèbre généticien
Albert Jacquard participait
également à ce colloque. Les Actes de ce colloque ont été publiés
par l'UNESCO avec une préface du professeur
François Jacob, Prix Nobel de Médecine.
Léopold Sédar Senghor
quitte le pouvoir en décembre 1980. Son successeur est le président
Abdou Diouf. Celui-ci fait voter
par l'Assemblée nationale une loi supprimant la limitation du
multipartisme. Le 7 avril 1981, le Tribunal correctionnel de Dakar
met un terme aux poursuites judiciaires engagées par le gouvernement
sénégalais contre Cheikh Anta Diop. Le 18 juin 1981, le RND de
Cheikh Anta Diop est enfin reconnu après cinq années d'une lutte
sans relâche.
1982
: En avril-mai 1982, à l'initiative des
Éditions Sankoré dirigées par le linguiste
Pathé Diagne, est organisé à
l'Université de Dakar, un symposium sur l'ensemble de son œuvre.
Cheikh Anta Diop répond de manière approfondie à l'ensemble du corps
universitaire qui a procédé à une analyse critique de ses écrits.
Il prononce à Alger, le 30 novembre
1982, une conférence intitulée "Les apports
scientifiques et culturels de l'Afrique à l'humanité".
1983
: Répondant à l'invitation de l'écrivain antillais
Daniel Maximin et d'Ernest
Pépin, directeur du Centre
d'Action Culturelle de la Guadeloupe, il donne plusieurs
conférences en Guadeloupe.
Il préside, à l'Université de Dakar, du
7 au 8 juin 1982, le colloque Philosophie et Religion,
organisé par la "Revue sénégalaise de philosophie". Sa propre
communication s'intitule "Science et
Religion. Les crises majeures de la philosophie contemporaine".
A l'issue des élections législatives,
Cheikh Anta Diop refuse de siéger à l'Assemblée nationale en raison
de l'ampleur des fraudes constatées.
1984
: Le 28 avril 1984, dans le cadre de la Semaine culturelle de
l'École Normale Germaine Legoff à Thiès au Sénégal, il présente une
communication intitulée : "Làmminu réew mi
ak gëstu" (Langues nationales et recherche scientifique),
dont la transcription a été réalisée par le linguiste
Aziz Diaw et la publication
assurée par le linguiste Yéro Sylla,
président de l'Association des
Chercheurs Sénégalais, dans la revue "Le
Chercheur".
Il donne, du 8 au 13 mai 1984 à Niamey
au Niger, une série de conférences à l'invitation du Gouvernement
nigérien.
1985
: Cheikh Anta Diop est invité à Atlanta aux USA ; il est reçu par le
maire d'Atlanta Andrew Young et
par l'Association Martin Luther King.
Il donne plusieurs conférences et interviews. Le 4 avril 1985 est
proclamé "Dr. Cheikh Anta Diop Day".
Cheikh Anta Diop aux USA, 1985
Cheikh
Anta Diop invité à Atlanta aux USA.
De
gauche à droite :
Dr. Hugh M. Gloster, Coretta Scott King, Cheikh Anta
Diop, Dr. Lawrence Carter Dean of the Martin Luther King Jr.
International Chapel de Morehouse College à Atlanta. En
arrière plan le portrait de l’illustre Martin Luther King
Le 7 juin 1985, il donne une conférence
portant sur "L'importance de l'ancienne
Égypte pour les civilisations africaines", au Centre
Georges Pompidou de Beaubourg, à Paris, dans le cadre des
"Journées des Cultures Africaines 2" organisées par
l'Association Kaléidoscope et le Service des Affaires
Internationales du Ministère de la Culture français.
1986
: Du 6 au 9 janvier 1986, à Yaoundé, il préside le Colloque sur l'Archéologie
camerounaise. Il donne, le 8 janvier, dans le Palais des Congrès
de la capitale camerounaise, sa dernière conférence : "La
Nubie, l'Égypte et l'Afrique noire".
Cheikh Anta Diop au Cameroun,
1986.
Cheikh Anta DIOP décède le 7 février
1986, à son domicile de Fann, quartier situé non loin de
l'Université de Dakar qui aujourd'hui porte son nom.
Il repose à Caytou, son village natal.
Son épouse d’origine française, Louise Marie DIOP-MAES,
décédée le 4 mars 2016, est également inhumée à Caytou. Historienne
et géographe, elle a soutenu le 12 février 1983 une thèse d'Etat
intitulée "Recherche sur la population
de l'Afrique noire" à l’Université
Paris-1/Panthéon-Sorbonne. Sa thèse est publiée sous le titre
Afrique noire - Démographie, sol et
histoire ; il s’agit d’un travail de recherche
pluridisciplinaire (préhistoire, archéologie, géo-climatologie,
histoire, socio-économie, démographie), qui remet en cause la
vision habituellement présentée de l'évolution de la population de
l’Afrique subsaharienne de la préhistoire au milieu du 20ème
siècle.